Une soukka sur Bayard
J’ai croisé Paul un soir de pluie. Il s’affairait autour d’une étrange construction faite de carton, de bambou et de toile de plastique. Fonctionnaire au ministère de la Justice, Paul s’implique le soir dans la communauté juive de Québec, qui compte près de 150 familles. Il m’a appris qu’on soulignait, ces jours-ci, Soukkot, la Fête des Tentes, des Cabanes ou des Tabernacles, selon les traductions.
Je me demande ce que les voisins pensent de moi. Je suis bien habillé, je suis rasé de près, mais le matin, je sors faire ma prière et ensuite, je cours attraper l’autobus. Et j’ai construit cette affaire-là, pas ben solide. Ils doivent croire que je suis cinglé. »
Voir les étoiles
Mon presque voisin m’offre une tasse de thé fumant. Il m’invite à m’asseoir dans sa cabane et entreprend de me parler de cette mystérieuse Fête des Tentes. Celle-ci succède aux fêtes de Roch Hahana (Nouvel An) et du Yom Kippour (Jour du Grand Pardon), qui se déroulent toutes vers septembre ou octobre, selon les années.
Soukkot évoque notre histoire, plus particulièrement ce moment où nous avons été libérés de l’esclavage, en Égypte. Pendant 40 ans, les Hébreux ont vécu dans le désert. Ils devaient s’en remettre complètement à Dieu. Comme nos ancêtres, nous sommes invités à vivre, pendant une semaine, dans une soukka. L’idée est de faire ça de ses propres mains, pas d’acheter des choses toutes faites. Que tu habites un appartement, une maison ou un immense château, durant Soukkot, tu dois être en mesure de voir les étoiles la nuit. »
Paul me tend un faisceau composée de trois espèces végétales différentes, puis ouvre une boite marquée d’inscriptions en hébreu. On y trouve un gros citron jaune. Ces items sont nécessaires pour prononcer le Hallel, en direction de Jérusalem. Dans la Soukka de Paul, une flèche pointe vers la ville sainte.
Nous les Juifs entretenons un lien spécial avec la terre d’Israël. Quand je suis sous ma soukka, dans mon quartier, une partie de mon âme est transportée, le temps d’un moment, à Jérusalem. Dans ma soukka, je mange et je prie, avec mes confrères et mes consoeurs. Nous sommes tous, d’une certaine manière, ensemble. Ma soukka est petite, mais elle accueille beaucoup de gens. Je m’y sens proche de Dieu. »
Soukkot s’est terminé dimanche dernier. La soukka de Paul a résisté à la tempête. Il m’a dit qu’avec le citron, il a fait de la confiture.
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