Artistes du quartier (6) : Patrick Anktil, le sculpteur horrifique

Sculpture de Patrick Anktil
Crédit photo : Synbryo

Depuis quelques semaines, Monsaintsauveur.com vous invite à découvrir des artistes en arts visuels qui travaillent dans le quartier Saint-Sauveur. Aujourd’hui, rencontre avec Patrick Anktil.

On peut sortir Patrick Anktil du Mur insolite – la galerie qu’il a cofondée dans Saint-Sauveur – mais sortir le Mur insolite de Patrick Anktil, ce serait un peu comme une amputation. L’accès à cet espace était nécessaire dans sa démarche de sculpteur horrifique dont les œuvres en matériaux recyclés, de par leur genre et leur format, ne s’accrochent pas aisément dans n’importe quel lieu ou événement de diffusion.

Naïf horrifique

sculpture de Patrick AnktilJeune, Patrick Anktil était un petit bricoleur qui utilisait ses jouets comme matière première et s’amusait à les transformer. C’est peut-être de là que provient le « côté naïf » qui, dans certaines de ses œuvres, coexiste avec le macabre et en accentue l’effet déstabilisant.La violence n’a jamais été pour lui l’attrait du dark art. Ce sont plutôt les couleurs, les textures, les personnages du fantastique et de l’horreur qui l’intéressent. Cette inspiration se traduit d’ailleurs, dans la communauté de créateurs dark, par des démarches et des styles très diversifiés, voire colorés.La première fois qu’il s’est plu à l’école, c’était pendant son DEC en sculpture à la Maison des métiers d’art. Cette formation lui a aussi ouvert les portes d’espaces et d’équipements essentiels à sa pratique, qui implique la taille directe du bois suivie d’un brûlage avant l’assemblage et l’ajout des pièces de métal.

(…) le bois est pour moi le matériau se prêtant le mieux aux mondes qui vivent en moi. Les textures qu’il permet illustrent justement les caractères torturés des personnages macabres. La finition par le feu sur le bois accentue l’expression des ténèbres (…) »

 De l’outre-tombe à l’Afrique

Sculpture humaine de Patrick AnktilAux premières influences esthétiques de Patrick Anktil, issues des films d’horreur et d’épouvante, s’est ajoutée avec le temps l’imagerie du vaudou et de la sorcellerie africaine. Les masques et objets comme ceux qu’on a pu voir dans l’exposition Haïti in extremis au Musée de la civilisation le fascinent et stimulent sa créativité.Il explore aussi le corps humain, mort ou vif. Sa pratique intègre des mises en scène, des « sculptures humaines », où il fait interagir avec ses oeuvres des interprètes en chair et en os. L’os étant une autre de ses muses, il a déniché un site Web où l’on revend – tout à fait légalement, assure-t-il – des morceaux de vieux crânes ayant servi à des études médicales.

Le Mur

Patrick Anktil occupe à la Maison des métiers d’art un emploi qui assure sa subsistance tout en lui permettant de conserver un pied dans l’art et l’accès aux ateliers. Ses œuvres, en plus d’être exposées, se retrouvent parfois sur des pochettes de CD, dans des vidéoclips ou des décors de films. Musiciens et cinéastes sont nombreux autour de lui et du Mur insolite, où des projections et autres happenings s’ajoutent aux expositions, du printemps à l’automne.Les temps libres du sculpteur horrifique sont en bonne partie consacrés à ce lieu de diffusion et à ses activités. Avec L’Usine 106U, il est un des seuls lieux québécois voués au dark art et aux genres périphériques, ce qui amène dans cet ancien dépanneur de la rue Hermine des créateurs de la Métropole et d’ailleurs. Les artistes mettent la main à la pâte pour effectuer les tâches de maintenance, montage et démontage.Patrick AnktilQuand des curieux poussent les portes du Mur pour la première fois, Patrick Anktil les accueille amicalement et s’efforce de leur expliquer son art et celui de ses pairs.Pour la première fois tout récemment, il a décroché une bourse, de Première Ovation, pour la diffusion de la programmation 2015 du Mur insolite. Un premier pas, peut-être, vers ses aspirations pour le lieu et ses créateurs : rayonnement accru, espace et installations (électricité, plomberie) améliorés, ouverture à l’année (actuellement impensable faute de chauffage adéquat)…

  • On peut voir les œuvres de Patrick Anktil dans la prochaine exposition du Mur insolite, Le Grand Feu, qui réunit aussi une douzaine d’autres incendiaires depuis samedi dernier et jusqu’au 16 août.

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