Saint-Sauveur, c’est une vraie mine d’or pour les histoires de quartier. Des histoires à mon goût, en tout cas. Il y en a une que je gardais en réserve depuis l’an dernier. En fait, je cassais les oreilles des autres blogueurs avec celle-ci, à chaque rencontre d’équipe.
Georgette est dans le chemin (1 de 2)
Saint-Sauveur, c’est une vraie mine d’or pour les histoires de quartier. Des histoires à mon goût, en tout cas. Il y en a une que je gardais en réserve depuis l’an dernier. En fait, je cassais les oreilles des autres blogueurs avec celle-ci, à chaque rencontre d’équipe.
L’anecdote me vient d’un gars du quartier. Un vrai, un local. Je dis ça parce que, contrairement à moi, ça fait plusieurs générations que sa famille réside dans la basse-ville. Des deux bords. On discutait du réaménagement du boulevard Charest qui a été fait dans les années 2000.
C’était pas vraiment un luxe. Avant, pour ceux qui s’en souviennent, c’était laid pas juste un peu. Pas d’arbres, pas de plantes, pas d’aménagement. Il y avait un terre-plein au milieu et le côté nord, c’était des cours arrières. C’est en voyant ça qu’on comprenait que pour élargir le boulevard, une rangée de maisons avait été démolie. C’est pas mal pour ça que le boulevard Charest faisait dur de même. Bref, on discutait du nouveau boulevard Charest et c’est là qu’il m’a raconté son histoire de famille.
« Ma mère, Georgette, a été expropriée deux fois à cause du boulevard Charest. La première fois, elle était jeune et elle restait encore chez ses parents. Sa famille habitait un logement sur la rue Morin et c’est la rue qui a été rasée pour ouvrir le boulevard dans Saint-Sauveur. Plus tard, elle avait un chalet au lac Saint-Augustin. Elle a encore été expropriée pour l’autoroute 40. Ça fait qu’elle a été expropriée deux fois pour le même axe routier. »
Non, mais, se faire exproprier deux fois pour la même route, ça s’invente pas. J’ai décidé de garder ça dans mon tiroir à idées.
Un cadeau pour le Père Noël
Une année, un peu avant les fêtes, le Patro Laval m’a demandé de faire le Père Noël au « Noël des aînés ». J’ai pensé avoir pris quelques livres en trop. Pas grave, j’ai un bon sens de l’autodérision, et j’ai accepté. Le travail était simple. Il y avait des cadeaux à faire gagner. Le Père Noël devait tirer les noms d’un chapeau et se faire photographier avec le gagnant. Trop facile. J’en ai ajouté une couche avec mon répertoire de blagues de « mononcles ».
« Avez-vous été sage? Pas trop, j’espère. Il faut bien avoir un peu de fun! Ho! Ho! Ho!»
Vous voyez le genre? J’en profitais. Le public était captif et ils voulaient tous être pigés. Au deuxième ou troisième prix, je tire un nom : « Georgette P. » J’allume. C’est le nom de la dame que je veux rencontrer pour parler de ses expropriations. C’était la première fois que je la rencontrais. C’est le Père Noël qui venait de tirer le gros lot!
« – (moi) Georgette P., venez chercher votre cadeau. Avez-vous été sage?
– (elle) Oui
– (moi) Vous êtes bien Georgette P., la grand-mère de V. et de L.?
– (elle) Oui, mais comment ça vous savez ça, vous?
– (moi) Vous savez pas encore à votre âge que le Père Noël sait tout! Ho! Ho! Ho! »
Georgette n’avait pas l’intention de s’en faire passer une comme ça. Le Père Noël était un peu trop informé à son goût. Après les tirages, elle est venue me voir backstage. Là, le Père Noël était à moitié costumé, et on voyait bien que c’était pas le vrai. Je lui ai dit que je connaissais bien la famille de son fils et que mon plus vieux était ami avec son petit-fils. J’en ai profité pour lui parler de mon idée de texte. Elle semblait rassurée et intéressée parce qu’elle s’est mise à me placoter ça solide.
« Moi, c’est pas deux fois que j’étais expropriée, c’est trois! J’avais un terrain de camping dans le coin de Val-Bélair. Sur un terrain appartenant à la communauté religieuse des Oblats. Le camping au complet a été exproprié pour construire des bâtiments de la ville. Je vous le dis, faites-moi pas déménager chez vous, ils vont vous exproprier. »
Comme interview, ça promettait. Ça n’avait pas l’air de la déranger trop que le gars en avant soit en bobettes, même si c’était le Père Noël. C’est certain qu’une grand-mère, ça a déjà vu ça, des gars en bobettes. Pis le Père Noël, elle doit plus trop y croire au nombre de fois qu’elle a été expropriée. Moi par contre, ça me gênait un peu. J’ai fini de m’habiller et je lui ai dit que je la recontacterais pour en jaser plus en détail. Avec un calepin, un crayon et pas en bobettes!
À suivre…
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