Histoires d’appartement
Ma grand-mère disait que si quelque chose était fait pour nous, bien que cette chose-là allait nous attendre. C’est en plein ce qui s’est produit avec mon appartement dans Saint-Sauveur.Ça a commencé par un coup de foudre. En revenant du badminton le soir, je ne pouvais m’empêcher de l’admirer du trottoir. Il me plaisait vachement avec son style contemporain, son mur de briques et cette sorte de passe-plat entre la cuisine et le salon, genre de fenêtre, au-dessus de laquelle pendaient des coupes pour le vin. Je me voyais déjà recevoir mes invités guindés comme dans les pubs de Baileys.Quelques temps plus tard, je repassais devant cet appartement en revenant d’une date et c’est à ce moment que j’ai su que les locataires, de très bons amis de ma dite date, déménageaient en Europe et qu’ils cherchaient une personne pour les remplacer. Non mais c’est-tu assez bien fait la vie? Bref, j’ai pris l’appartement, mais pas le gars!J’ai emménagé en juin 2012 par un beau samedi ensoleillé. J’avais engagé une poignée de collègues en échange de la bière et de la fameuse pizza aux côtes levées du Normandin, disponible seulement l’été. Comme je n’avais pas de gros morceaux, on s’en est sortis en moins d’une heure. Juste avant que le ciel ne nous tombe dessus et que tout le monde décampe. On a quand même eu le temps de descendre toutes les canettes et manger toutes les croûtes. J’avais encore eu une sacrée veine.
Si les objets pouvaient parler
Je dis souvent que mon appartement est commandité par IKÉA et les Escomptes Lecompte. Je pourrais aussi dire qu’il est encouragé par le quartier Saint-Sauveur. En effet, de mon lit acheté chez Matelas Dauphin sur Marie-de-L’Incarnation jusqu’aux objets qui ornent mes murs, j’ai de petites anecdotes rattachées à mon quartier chéri.
Le sofa bleu de Geneviève
On n’était pas destinés lui et moi, j’en avais spotté un autre. Plus neuf, plus actuel, plus cher et surtout plus gros. Tellement gros, qu’il a jamais vu la couleur de mon salon, ni celle de mon corridor d’entrée. Après avoir écouté les livreurs s’obstiner pendant 45 minutes, j’en eu assez. Je leur ai donné congé et j’ai demandé un remboursement.Découragement…Ça faisait des mois que je cherchais LE SOFA et ma voix en écho dans mon salon vide commençait sérieusement à me peser. Puis, comme un miracle de Noël, mon amie Geneviève de Saint-Sauveur publia une annonce pour son sofa vintage à donner. Ni une, ni deux, je suis allée le cueillir à son appartement puis l’ai ramené, piètrement attaché et à moitié sorti de l’arrière d’une camionnette. Il a passé la porte et s’est entendu à merveille avec le reste du mobilier malgré son âge avancé. Plus tard, j’ai adopté son petit frère le fauteuil qui se plaît aussi chez nous.
Le trophée de chasse de Anne
Un couple d’amis avait fait l’acquisition d’un triplex dans le quartier Saint-Sauveur. Le bâtiment appartenait à un homme assez âgé et son talent en matière de décoration était visiblement resté dans les années 60. Au sous-sol, il avait peint une fresque, une belle scène d’hiver, sur les pierres de fondation et dans un autre coin, il avait installé un bar. Il avait tout laissé : les bouteilles, les verres et tout le bataclan. C’était de toute beauté, du kitsch de haute voltige. Quoi qu’il en soit, il y avait cette tête d’orignal en plastique que j’ai acquise et que j’ai repeint, en ne manquant pas de faire une grosse trace de peinture blanche sur ma table de patio verte forêt.
L’horloge de Mme Beaumont
Pour rester dans les années 60 et le bricolage, je termine par l’histoire de mon horloge en forme de soleil. C’est une histoire un peu plus triste. Elle appartenait à Mme Beaumont, une dame d’une immense gentillesse qui a habitait au-dessus de chez mon ancien copain jusqu’à ce qu’elle perde son combat contre le cancer. Elle nous saluait toujours et ne se plaignait jamais. On ne l’entendait tout simplement pas. Même qu’une fois, elle a attendu toute une journée avant de nous dire qu’elle n’avait plus d’eau, de peur de nous déranger pendant nos rénovations. On se sentait tellement mal! Lorsqu’elle est décédée, ses enfants sont venus vider son appartement et son horloge s’est retrouvée au chemin. C’est là où je l’ai recueillie et ensuite repeinte.Maintenant l’horloge dorée a fière allure sur mon mur. Juste-là, au-dessus de l’espèce de fenêtre passe-plat que je ne sais toujours pas comment appeler.
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