Lévisien d’origine, fondateur du Festival Québec Jazz en Juin, chef d’entreprise et à la tête d’une équipe de voile, Gilbert Dion a adopté Saint-Sauveur il y a de ça quelques années. Dans ce portrait, il retrace les voyages qui l’ont mené à Saint-Sauveur et surtout l’origine de sa passion pour la musique.
Gilbert Dion : « On a des musiciens au Québec de classe mondiale »
Lévisien d’origine, fondateur du Festival Québec Jazz en Juin, chef d’entreprise et à la tête d’une équipe de voile, Gilbert Dion a adopté Saint-Sauveur il y a de ça quelques années. Dans ce portrait, il retrace les voyages qui l’ont mené à Saint-Sauveur et surtout l’origine de sa passion pour la musique.
L’arrivée dans Saint-Sauveur
C’est accoudé au coin d’une table d’extérieur, à quelques pas de son entreprise, que M. Dion m’a raconté les hasards qui l’ont mené à Saint-Sauveur en 2003. Issu d’une famille de commerçant lévisiens, il débute lui aussi dans une manufacture à Lévis. À la suite d’une expropriation, il est forcé de déménager à cause d’un projet qui, finalement, ne verra jamais le jour. Bien chanceux dans sa mésaventure, il tombe un sur une « petite pancarte », qui indique qu’une bâtisse dans Saint-Sauveur est à vendre. Il saisit l’opportunité et s’installe dans Saint-Sauveur, rue Saint-Vallier Ouest.
On ne peut pas parler de M. Dion, sans évoquer son entreprise Les Foyers Don-Bar, qu’il a construite très jeune, au détour d’un projet d’étude en marketing de l’Université Laval et d’un voyage en Europe.
« Le hasard a fait que lors d’un voyage en Europe, j’ai fait une grande virée vers la France, l’Allemagne, la Suisse, la Hollande et puis j’ai voulu revenir à Paris, en passant par Bruxelles. Par hasard, Avenue Louise, j’ai vu un magasin avec des beaux foyers, puis j’ai dit « Waouh ». Ici dans les années 70, il y avait des caissons mais rien de design. »
La rencontre avec Charles Dombard
Par hasard, M. Charles Dombard est présent ce jour-là, Avenue Louise, et reconnaît « le bel accent québécois » de Gilbert Dion. Comment? Le Bruxellois avait vécu plusieurs années au Québec et savait reconnaître les accents de Québec du Saguenay, de la Côte-Nord, et ça, jusqu’en Beauce. C’est ici qu’une rencontre humaine et d’affaires naît. Monsieur Dombard deviendra, par la suite, le « père spirituel » de Gilbert Dion.
Dans les yeux de M. Dion, on peut lire l’admiration et la fierté d’avoir rencontré M. Dombard. On en garde le sentiment que des rencontres irriguent des vies.
En effet, le Belge le forme à réaliser toutes les tâches de l’entreprise. Il retourne donc en Belgique, par une série de quinze à vingt de voyages. Le but? Celui de former, par la suite, des travailleurs au Québec et de recréer ces foyers alors uniques dans la région. Soudage, assemblage, installation, il y réalise un apprentissage qui lui permet de garder en tête toutes les étapes.
À la mort de ce « père spirituel », il récupère toutes les parts de l’entreprise et continue de mener la barque.
Plus qu’un gagne-pain, M. Dion parle de son entreprise comme de sa progéniture : « mon bébé, c’est mes employés; mon bébé, c’est mon entreprise ». Il lui a consacré toute sa vie. En souriant, il exprime d’ailleurs sa joie, quand après l’installation d’un foyer, il allume le premier feu dans une maison et partage un repas ou un verre avec ses clients.
« J’ai beaucoup aimé le quartier, t’sais à Lévis y se passe pas grand-chose »
Pour M. Dion, le quartier Saint-Sauveur a très bien changé. Malgré quelques craintes de départ sur son activité importante, en comparaison de Lévis, plus calme, il s’est vite fait à la vie de quartier de Saint-Sauveur.
« C’est un quartier bruyant le jour, mais le soir, c’est très tranquille. J’étais surpris car le soir, le seul bruit que j’entendais, c’était les chevaux et les calèches. L’écurie n’était pas loin d’ici et le soir, vers 22 h, 23 h, j’entendais les chevaux, puis le matin aussi : “cloc cloc cloc cloc”. Jusqu’à il n’y a pas si longtemps, les calèches passaient par ici, j’avais vraiment l’impression d’être en campagne. »
Pour s’intégrer au quartier, il raconte comment le fait d’avoir son entreprise sur l’une des plus vieilles rues commerçantes lui a fait développer ses habitudes. Il évoque d’ailleurs l’ancien restaurant en arrière ou l’avenue Cartier à seulement deux trois foulées.
L’amour de la musique
Avant de devenir l’amateur de jazz qu’il est, M. Dion était, dans sa jeunesse, un fan de rock progressif. Aujourd’hui, s’il aime tant le jazz, c’est qu’avant tout il aime profondément la musique. À la question de savoir si cet engouement pour la musique lui vient de ses parents, il répond par la négative : « mes parents n’écoutaient aucune musique, quoi que ce soit ». De fil en aiguille, avec des musiciens qui avaient des formations classiques, Gilbert Dion en est venu à apprécier le classique, la musique baroque ou encore la musique médiévale.
Son implication dans le jazz remonte aux années 2000, lors de son arrivée à Québec. On peut parler de sa participation au Festival international de jazz de Québec. Il a aussi été le principal commanditaire du Festival de musique sacrée de l’église Saint-Roch, duquel il a fait partie du conseil d’administration, tout comme pour le Festival international de jazz de Québec.
« En général, sauf depuis la pandémie, je vais voir environ entre 150 et 175 concerts par année », confie-t-il.
Il y a quatre ans, Gilbert Dion a décidé de fonder son propre OBNL. Diffusion Jazz à Québec a pour objectif de promouvoir les musiciens de Québec et du Québec. D’ailleurs, le dernier Festival Québec Jazz en Juin en date, en juin dernier, rassemblait exclusivement des musiciens du Québec.
On peut alors s’interroger pour savoir si M. Dion a un jour joué d’un instrument, ce à quoi il vous répondrait, amusé :
« J’ai pas la patience, j’ai pas le temps. T’sais j’ai des amis musiciens et je les vois travailler pendant des années avant de sortir la moindre note. C’est dur! »
C’est bien pour ça que sa mission est de produire des concerts et de s’assurer que les musiciens soient bien payés.
Tous les soirs, à défaut de jouer, il écoute de la musique, souvent en travaillant. C’est une bibliothèque avec des milliers de CD qui l’accompagne au quotidien.
En parallèle, il organise des concerts, dont au District Saint-Joseph, quand il n’assiste pas à des concerts du Fou Bar.
Une communauté jazz soudée
Les fervents amateurs de jazz forment une communauté soudée à Québec. Ce sont des rencontres « incroyables » que cette culture du jazz a fait naître, comme celle avec l’animateur à CKIA Alain Lalancette ou l’animateur CKRL, Denis Lelièvre. Grâce à son émission de radio sur CKRL dans les années 1970, c’est Denis Lelièvre qui a « contaminé » Gilbert Dion au jazz.
Les routes se rejoignaient avec Alain Lalancette, car ils participaient tous deux aux mêmes concerts. Un jour qu’ils jasaient musique, à un concert de musique sacrée, Alain lui demande : « C’est quoi tes groupes préférés? ». Ni une, ni deux, les noms s’enchaînent et se recoupent, ils avaient les mêmes groupes, disques, artistes préférés.
Si l’on parle maintenant de ses premières amours musicales, Gilbert Dion cite en premier l’École ECN, une école nordique (suédois, norvégien, allemand), qui est en réalité un courant de musique qui produit ce que M. Dion appelle de la « musique de paysage ». D’ailleurs, Jean Beauchêne, ancien programmateur du FEQ (que M. Dion considère comme une « encyclopédie de musique jazz et progressive ») lui a fait découvrir ce courant de musique, en faisant venir les groupes à Québec.
« C’est rare qu’un musicien à Québec que je le connais pas »
Dans les rencontres avec des musiciens qui l’ont marqué, il nomme des artistes comme Marianne Trudel, Karen Young, Yves Leveillé ou ici à Québec, André Larue qui est saxophoniste, Carl Mayotte, Stéphane Chamberland. Il raconte aussi sa découverte récente de Lucie Roy. Pour Gilbert Dion, au vu du talent des artistes québécois, il faut les faire connaître, plus que jamais.
Étant donné la situation « catastrophique » avec la pandémie, il a été le principal contributeur, avec son entreprise, au Festival Québec Jazz en Juin. Organisé en virtuel, cette année, le défi était pour les musiciens de jouer sans le public. C’était « décontenançant » pour les musiciens jazz de réaliser des solos ou d’autres performances sans communiquer avec le public. Gilbert Dion raconte comment les musiciens jazz sont en perpétuel contact avec l’audience, alors la musique virtuelle est un nouveau défi. Désormais, les salles se remplissent, mais la capacité y est souvent réduite.
Si vous vous demandez à M. Dion quel nouveau projet il aimerait faire advenir, il vous répondra peut-être que son rêve serait de voir naître un restaurant musical de jazz…
Gilbert Dion m’a d’ailleurs partagé ses morceaux favoris, vous pouvez écouter cette playlist qui rassemble dix d’entre eux :